Le secteur réglementé de l’habitation en Principauté : le rôle social des lois n°1235, 1291 et 887

La Principauté de Monaco reste un lieu exceptionnel qui bénéficie d’une qualité de vie inégalée, jouissant notamment d’une image de sécurité, sérénité, prospérité économique et fiscalité avantageuse. Pour toutes ces raisons, et bien d’autres encore, la demande d’acquisition ou de location de biens immobiliers aux fins d’obtenir soit la résidence, soit de constituer un patrimoine restent soutenues. 

Mais avant de se lancer dans une recherche, il faut savoir que l’habitation en Principauté est répartie en différents secteurs : le secteur libre, le secteur domanial et, celui qui nous intéresse ici, le secteur réglementé (ou ancien) dont nombre de personnes se demandent quelles sont les spécificités de ces appartements dits « sous loi » qui le composent. Ces derniers sont soumis à des lois qui régissent la sphère de la location et qui, en conséquence, ne s’appliquent pas aux acquéreurs de biens immobiliers qui envisagent d’y habiter.

 

Le secteur réglementé concerne les immeubles anciens

 

Le secteur réglementé concerne la plupart des appartements situés dans des immeubles « anciens » construits ou achevés avant le 1er septembre 1947 et soumis depuis l’après-guerre à une réglementation destinée à protéger les droits des locataires. Selon une étude de l’IMSEE parue en 2013, il apparaît que

2 500 appartements anciens font partie de ce secteur mais, de par sa nature, ce parc immobilier diminue au fil du temps et au gré des destructions.

 

La législation applicable

La législation actuelle applicable à ce secteur fait coexister deux régimes de location d’appartements : le secteur protégé régi par la loi n°1235 du 28/12/2000 (modifiée par la loi n°1291 du 21/12/2004) et le secteur libéralisé régi par la loi n°887 du 25/06/1970, tous deux soumis à un droit de préemption étatique dans le cadre d’une vente (délai de préemption de 4 semaines maximum après la signature d’un compromis de vente), puis si l’Etat n’exerce pas ce droit, soumis au droit de préemption du locataire.

 

  • Le secteur protégé

Ce texte a une vocation sociale destiné à permettre, aux Monégasques comme aux enfants du pays, de trouver un logement en Principauté. Les propriétaires choisissent leurs locataires parmi les personnes protégées ayant manifestées leur intérêt (voir conditions d’éligibilité ci-après) et ne peuvent pas louer aux tarifs bien plus avantageux du secteur libre car ceux-ci sont définis par l’Etat. Cependant, une clause d'indexation des loyers suivant l'indice des prix à la consommation (hors tabac) publié par l’INSEE peut être insérée dans le bail.

Dans tous les cas, les conditions de location doivent être visées par la Direction de l’Habitat.  

Les biens du secteur protégé ne peuvent être loués qu’aux personnes inscrites en qualité de personne protégée réparties selon les catégories suivantes et dans l'ordre de priorité indiqué : 

  1. les personnes de nationalité monégasque ;
  2. les personnes nées d'un auteur monégasque ; les conjoints, veufs ou veuves de Monégasques ; les personnes divorcées de Monégasques, pères ou mères d'enfants nés de cette union ;  
  3. les personnes nées à Monaco, qui y résident depuis leur naissance, à la condition que l'un de leurs auteurs ait également résidé à Monaco au moment de celle-ci ; peuvent toutefois être dispensées de la condition de naissance à Monaco les personnes qui, tout en remplissant les autres conditions visées au présent paragraphe, seraient nées hors de la Principauté en raison d'un cas fortuit ou pour des raisons médicales ou de force majeure ; 
  4. les personnes qui résident à Monaco depuis au moins quarante années sans interruption. 

Il convient de préciser que la qualité de personne protégée ne peut être reconnue aux personnes étrangères dont les ressources dépassent un plafond dont le montant est fixé chaque année par Ordonnance Souveraine.

Le contrat de bail offre une meilleure protection du locataire du fait notamment qu’il est conclu pour une durée de 6 ans. Il peut être résilié par la seule volonté du locataire en cours de bail ou à son échéance, avec un préavis de trois mois, à charge pour lui de payer les loyers jusqu’à la fin du préavis.

De son côté, le propriétaire peut résilier le contrat de bail moyennant un préavis d’au moins six mois s’il entend faire jouer son droit de reprise :

  • soit pour l’occuper lui-même ou le faire occuper par ses ascendants ou descendants ou leur conjoint, par ses frères ou sœurs ou leurs descendants, ou par les ascendants ou descendants de son conjoint, dans les conditions prévues par la loi ;
  • soit s’il entend démolir pour reconstruire, ou surélever, ou modifier pour créer de nouvelles surfaces habitables, ou réparer et améliorer l’immeuble, lorsque dans ces trois derniers cas la totalité des locaux que le locataire occupe est rendue inutilisable par l’exécution des travaux. 

Le relogement du locataire doit alors être assuré, pour la période du bail restant à courir, dans un local en bon état d’habitabilité situé à Monaco, sans que le montant du loyer puisse excéder celui résultant du bail en cours.

Le propriétaire peut également donner congé à son locataire s’il est régulièrement autorisé pour effectuer des travaux autres que ceux visés ci-dessus, lorsque les biens que le locataire occupe sont rendus impropres à l’habitation par l’exécution des travaux.

Le locataire évincé est relogé provisoirement dans les mêmes conditions que celles évoquées précédemment et, dans le mois qui suit l’issue des travaux, le locataire est réintégré dans le local qu’il occupait.

Cependant, la loi prévoit que lorsque le locataire est handicapé ou âgé de plus de 65 ans, le droit de reprise ne peut être exercé durant les six premiers mois du bail.

Dans tous les cas où le propriétaire résilie, le locataire peut partir à tout moment pendant la période des 6 mois de préavis et les loyers cessent d’être dus dès lors qu’il s’en va.

En cas de vacance du logement, une déclaration doit être effectuée par le propriétaire à la Direction de l’habitat dans le mois suivant la libération du logement (si aucune déclaration n’a été faite dans les 3 mois, une amende de 50.000€ pourraient s’appliquer). Sauf motif légitime (travaux, remise à la location, exercice du droit de reprise), le logement doit être effectivement occupé avant l’expiration d’un délai de trois mois à compter de la date de déclaration, sauf nécessité particulière de remise en état ou aux normes. Dans le même temps, ou lorsque le logement est à nouveau occupé, une déclaration de location ou d’occupation à titre gratuit doit être effectuée.

Enfin, ces logements peuvent être partiellement affectés à l’exercice d’une activité associative ou professionnelle non commerciale dont l’exercice est soumis à l’accord préalable du propriétaire et ne doit pas être interdit par le règlement de copropriété. Le contrat de location devra alors préciser la désignation, le cas échéant, des pièces affectées à l’exercice de l’activité.

 

Le secteur libéralisé

 

La loi n° 887 est le premier texte de libéralisation du secteur ancien d’habitation. Elle vise les locaux de meilleure qualité ou les locaux ayant toujours été occupés par leurs propriétaires. Moyennant l’obligation de consentir des baux de six ans renouvelables, elle libéralise les loyers, supprime l’obligation d’affichage de la vacance des locaux et étend la possibilité de location à d’autres personnes que les personnes prioritaires.

Les appartements qui relèvent de ce secteur sont destinés à être loués, en sus des personnes du secteur protégé, en faveur des personnes suivantes :

  • ascendants ou descendants, ou leur conjoint, du propriétaire ou de son conjoint;
  • personnes de nationalité monégasque;
  • personnes domiciliées à Monaco depuis au moins cinq ans et y exerçant une activité; professionnelle depuis plus de six mois;
  • personnes travaillant à Monaco depuis au moins cinq ans.

 

Le Bailleur doit ensuite fournir à la Direction de l’Habitat les justificatifs démontrant l’éligibilité du locataire pour cette location et obtenir son accord préalablement. Mais le propriétaire reste néanmoins libre de fixer le montant du loyer et d’insérer dans le bail une clause d'indexation de loyer.

Le propriétaire aura l'obligation de consentir au locataire un bail de six ans, reconductible pour des périodes de 6 ans, résiliable annuellement selon la seule volonté de ce dernier. Le propriétaire ne peut y mettre fin qu’à l’échéance et sans avoir à en justifier le motif, contrairement au régime de la loi n°1.235. Celui-ci pourra soit remettre les biens sur le marché, soit les habiter, soit les laisser vides, ce qui, pour ce dernier cas, diffère du régime de la loi n°1235.

En cas de vacance du logement, une déclaration doit être effectuée par le propriétaire dans les 8 jours suivant la libération du logement. Dans le même temps ou lorsque le logement est à nouveau occupé, une déclaration de location ou d’occupation à titre gratuit doit être effectuée.

Il est également possible de domicilier dans ces logements une activité professionnelle à caractère non commercial mais uniquement en usage mixte, c’est-à-dire avec la nécessité d’y établir sa résidence, et à la condition de ne pas embaucher de personnel. Il n’est pas envisageable de domicilier uniquement un bureau administratif, sauf rares exceptions. En revanche, domicilier une activité libérale sans établissement de la résidence est autorisée.

Parce que le marché de la location du secteur protégé est spécifique et très réglementé, Valeri Agency met à votre service son expérience et sa connaissance pour vous aider dans vos recherches d’un bien immobilier dit « sous loi », ou vous aider à le gérer si vous en êtes propriétaire.

 

Synthèse

 

Loi n°1235

Loi n°887

Obligation de louer ou de l’occuper

Oui

Non

(mais déclaration de vacance

OS n°4621, art. 2)

Loyer

Fixé par le gouvernement.

L’augmentation annuelle est encadrée

 

Montant librement fixé par le bailleur de même que l’augmentation annuelle

Choix du locataire

Selon le respect du rang de priorité des personnes éligibles

 

Librement selon les personnes éligibles

 

Durée du bail

6 ans

Reconduction automatique

Renouvellement de plein droit aux mêmes conditions

6 ans

Reconduction non automatique

Nouvelles conditions librement fixées par le bailleur

Résiliation/reprise du logement

Résiliable à tout moment par le preneur avec 3 mois de préavis

 

Résiliable à tout moment par le bailleur avec 6 mois de préavis et uniquement s’il entend exercer son droit de reprise

Résiliable annuellement par le preneur avec 3 mois de préavis

 

Résiliable à l’échéance des 6 ans par le bailleur avec 3 mois de préavis et sans justification

Destination des locaux

Pour habitation ou en usage mixte

Pour habitation, usage mixte ou professions libérales

Droit de préemption

Etat et dans un 2nd temps le locataire

Etat et dans un 2nd temps le locataire