Un dispositif destiné à assurer la pérennité du secteur protégé monégasque

A Monaco, le secteur protégé concerne la plupart des appartements situés dans des immeubles construits ou achevés avant le 1er septembre 1947. Celui-ci permet aux locataires protégés, principalement les Monégasques et les Enfants du Pays, de bénéficier de logements aux loyers modérés fixés par l’Etat et inférieurs à ceux pratiqués dans le secteur libre. Ces logements sont soumis à la loi n°1.235 du 28 décembre 2000, modifiée, destinée également à protéger leurs droits.

 

Mais, par sa nature, ce parc immobilier diminue au fil du temps, au gré des destructions des immeubles anciens par des promoteurs. En effet, les nouveaux immeubles ne comportent pas de logements soumis à cette loi puisqu’aucune mesure ne l’avait imposé, jusqu’à présent. Le secteur locatif à prix modéré diminue également car la majorité des propriétaires récupèrent les biens à loyer modéré pour leur usage propre ou celui de leurs enfants pour des raisons économiques évidentes.

C’est pourquoi, afin d’enrayer la disparition de ce secteur protégé et d’en créer un nouveau permettant aux personnes éligibles de vivre dans des logements plus confortables, un dispositif législatif a été élaboré, objet de la loi n°1.508 du 2 août 2021 relative à la sauvegarde et à la reconstruction des locaux à usage d’habitation relevant des dispositions de la loi n°1.235.

Le principe consiste pour l’Etat à récupérer au coût de la construction un ou deux étages, selon le cas, dans un nouvel immeuble bâti en fonction des surfaces de logement protégées détruites. Cependant, pour s’assurer que cette opération soit conforme à l’intérêt des propriétaires concernés, la loi prévoit de leur octroyer plusieurs contreparties pour assurer leurs intérêts et compenser l’effort qui leur est demandé consistant, pour l’essentiel, à accepter l’existence d’une copropriété avec l’Etat.

Nous vous expliquons ici comment les nouveaux mécanismes juridiques permettent d’atteindre ces objectifs tout en préservant l’intérêt des opérations de promotion immobilière, nécessaires au développement de la Principauté et jouant un rôle important dans l’économie locale.

 

Il faut préciser que le texte redéfinit les locaux soumis à la loi n°1.235 (article 1er de la loi n°1.508 modifiant l’article 1er de la loi n°1.235) qui ne vise plus seulement les locaux à usage d’habitation construits ou achevés avant le 1er septembre 1947 mais également ceux construits ou achevés après cette date quand ceux-ci :

  • se substituent, en application du nouvel article 39-1 de la loi n°1.235, à des locaux construits ou achevés avant le 1er septembre 1947 soumis aux dispositions de la loi n°1.235 et qui ont fait l’objet de travaux régulièrement autorisés de démolition intégrale ;
  • compensent, en application de cet article, le défaut de construction des locaux substitués visés ci-dessus.

 

Ainsi, sous réserve de construire et de céder à l’Etat, au sein de l’immeuble nouvellement construit ou dans un autre immeuble, un nombre d’appartements équivalent à ceux détruits et rentrant dans le cadre d’application de la présente loi., le propriétaire régulièrement autorisé à démolir l’intégralité de l’immeuble pourra disposer et jouir librement des surfaces supplémentaires reconstruites. En effet, avant toute démolition, il faudra que le propriétaire et l’Etat trouvent un accord au préalable quant aux modalités de l’opération et que certaines conditions soient remplies de façon cumulative.

Il convient de préciser que les dispositions de ce nouvel article ne sont pas applicables :

  • aux bâtiments soumis aux dispositions des articles 21 et 23 des Dispositions générales du Règlement d’Urbanisme en annexe de l’Ordonnance Souveraine n° 4.482 du 13 septembre 2013, modifiée : éléments bâtis remarquables et éléments de paysage remarquables (falaise, socle, jardin, etc.) ;
  • au secteur réservé dont le caractère actuel doit être conservé, qui comprend le quartier de Monaco-Ville et le ravin de Sainte-Dévote (article 12.1 A de l’Ordonnance Souveraine n° 3.647 du 9 septembre 1966, modifiée, concernant l’urbanisme, la construction et la voirie.

 

En plus du paiement par l’Etat d’un prix de cession des locaux dits de substitution ou de compensation calculé en prenant comme base le coût de la construction, le propriétaire doit bénéficier de plein droit de l’octroi d’une majoration du volume constructible par rapport à celui qui était occupé par l’immeuble détruit et dont il pourra jouir librement sans les contraintes prévues par la loi n°1.235.

Il faut noter que la mise en œuvre de la majoration du volume constructible exclut la possibilité de bénéficier des dispositions générales de l’article 12.6 en Annexe de l’Ordonnance Souveraine n°4.482 du 13 septembre 2013, modifiée, portant délimitation et règlement d’urbanisme du secteur des quartiers ordonnancés (« …dans le cas où la hauteur minimale de l’air libre entre sol fini du niveau N et la sous-face de dalle du niveau N+1 des pièces principales, d’un étage composé essentiellement de locaux d’habitation est portée de 2,70 mètres à 3 mètres ou plus, l’altimétrie du niveau supérieur d’un bâtiment autorisée au règlement peut être augmentée de 30 centimètres au maximum. Cette disposition est cumulative dans la limite de 11 niveaux »).

Enfin, le projet de construction pourra, par dérogation et sous réserve de l’accord de l’Etat, ne pas prévoir la construction de locaux à usage d’habitation de substitution au sein de l’immeuble reconstruit lesquels seront remplacés par d’autres locaux dans des conditions qui sont précisées dans cet article 39-1. Dans ce cas, l’Etat se voit proposer une autre solution de compensation dans le secteur libre.

En outre, les propriétaires bénéficient d’autres contreparties, comme celle, par exemple, d’être déchargés du relogement des locataires évincés à la suite de la démolition intégrale du local d’habitation puisque c’est désormais à l’Etat qu’incombe cette tâche.

En compensation, les propriétaires devront verser une indemnité à l’Etat pour chaque locataire ayant droit à un relogement. Ces locataires protégés ne bénéficient cependant pas des mêmes conditions de relogement selon la catégorie à laquelle ils appartiennent :

  • s’agissant du locataire de nationalité monégasque, l’Etat doit lui adresser une offre de relogement définitif dans un appartement domanial, hors procédure classique d’attribution des logements domaniaux ;
  • s’agissant du locataire qui a un lien personnel avec un Monégasque ou qui est un Enfant du Pays, l’Etat doit lui adresser une offre de relogement définitif dans un appartement soumis aux dispositions de la loi n°1.235, sans qu’il soit fait application de la procédure traditionnelle de mise en location prévue par ladite loi.

 

Lorsque, à défaut de logement disponible, le relogement à titre définitif s’avère impossible, le locataire évincé peut être provisoirement relogé par l’Etat dans un appartement présentant des qualités au moins comparables à celles du local initial.

Les frais normaux de déménagement sont, dans tous les cas, à la charge de l’État.

 

Au préalable, lorsque l’immeuble est occupé, le propriétaire qui entend donner congé à son locataire doit l’en informer dans le mois suivant le dépôt de la demande des autorisations de démolir et de construire, puis le lui notifier avant que ces autorisations ne soient définitives en respectant un préavis de six mois à compter de l’expédition de la lettre recommandée.

Le nouveau texte redéfinit ces personnes protégées de façon très précise (article 2 de la loi 1.508 modifiant l’article 3 de la loi 1.235), qu’il s’agisse des conditions de naissance, de résidence, ou encore des liens avec des personnes monégasques.

La nationalité étrangère est désormais clairement indiquée et les Enfants du Pays sont expressément visés.

Hormis le cas des personnes de nationalité monégasque (catégorie 1), les rangs de priorité définis dans ce texte reposent :

  • sur les liens personnels ou familiaux avec les Monégasques pour la catégorie 2 (personnes de nationalité étrangère). Il s’agit des personnes de nationalité étrangère :

– nées d’un auteur monégasque ou adoptées par une personne de nationalité monégasque et qui justifient d’au moins dix années de résidence en Principauté ;

– conjoints survivants d’une personne de nationalité monégasque non remariés ;

– partenaires d’un contrat de vie commune survivants d’une personne de nationalité monégasque et qui justifient d’au moins dix années de résidence en Principauté et n’ayant pas conclu un nouveau contrat de vie commune ou ne s’étant pas mariés ou remariés ;

– père ou mère assurant l’entretien et l’éducation d’un enfant de nationalité monégasque et dont le domicile constitue la résidence habituelle ou occasionnelle de l’enfant ;

– père ou mère ayant eu, pendant au moins dix ans, la charge effective d’un enfant de nationalité monégasque et qui justifient d’au moins dix années de résidence en Principauté ;

De nouveaux critères ont été intégrés et il faut préciser qu’il n’y a pas de création de rang de priorité au sein de cette catégorie de personnes.

  • sur la naissance et la présence sur le territoire de la Principauté pour les catégories 3 et 4 (Enfants du Pays). Il s’agit :

- des personnes de nationalité étrangère telles que définies en tant qu’Enfants du Pays par l’article unique de la loi n°1.506 du 2 juillet 2021 portant reconnaissance des « Enfants du Pays » et de leur contribution au développement de la Principauté de Monaco et dont l’un de leurs auteurs ou adoptants est également né à Monaco et y a résidé au moment de cette naissance ou de cette adoption ;

- des personnes de nationalité étrangère telles que définies en tant qu’Enfants du Pays par l’article unique de la loi n° 1.506 du 2 juillet 2021 portant reconnaissance des « Enfants du Pays » et de leur contribution au développement de la Principauté de Monaco.

La catégorie 5 concerne les personnes de nationalité étrangère qui résident à Monaco depuis au moins 40 années sans interruption.

 

En dernier lieu, la loi offre désormais la possibilité, pour le locataire, d’affecter partiellement des locaux soumis à la loi n°1.235 à l’exercice d’une activité professionnelle ou commerciale (article 9 de la loi 1.508 modifiant l’article 2 de la loi 1.235), en plus d’une activité associative (laquelle était déjà autorisée), dans les conditions cumulatives suivantes, sous réserve bien entendu de l’obtention des autorisations administratives nécessaires :

-  l’accord préalable du propriétaire doit être recueilli ;

-  l’exercice de l’activité ne doit pas être interdit par le règlement de copropriété ;

-  l’activité doit être exercée en nom personnel seulement, à l’exclusion de toute forme de société civile ou commerciale (en conséquence, pas de réception de clientèle, pas d’embauche de salariés, pas de stockage ou exposition de marchandises) ;

Ces conditions ne s’appliquent pas aux locaux du secteur protégé dont l’Etat est propriétaire lorsque le locataire est de nationalité monégasque ou l’une des personnes visées par la loi n°1.490 du 23 juin 2020 relative à la domiciliation d’une activité professionnelle dans un local à usage d’habitation dont l’État est propriétaire. Les conditions plus favorables de la loi n°1.490 leur sont applicables.

 

Il faut enfin préciser que l’affectation partielle des locaux pour l’exercice d’une activité associative, professionnelle ou commerciale ne peut entraîner :

– ni le changement de destination des locaux,

– ni l’application du statut des baux régis par la loi n°490 du 24 novembre 1948 concernant les baux à usage commercial, industriel ou artisanal, modifiée,

– ni l’application des règles particulières au bail à usage de bureau prévues par la loi n° 1.433 du 8 novembre 2016 (baux d’une durée de 5 ans).

 

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Nous venons de voir que le nouveau dispositif législatif concilie l’intérêt général, en permettant à l’Etat de pouvoir toujours assurer son rôle social à l’égard des Monégasques et des personnes présentant des attaches fortes avec la Principauté, et l’intérêt économique des propriétaires privés, tout en les dégageant de la responsabilité sociale qu’ils endossent. Ainsi, ces propriétaires seront à terme libérés des contraintes inhérentes à la loi n°1.235.

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Septembre 2021