Droits et obligations des propriétaires bailleurs de logements à Monaco
Le marché immobilier locatif monégasque est un marché particulier qui requiert une compréhension approfondie des droits et obligations des propriétaires bailleurs et de leurs locataires, et ce, quelle que soit la destination des biens (usage d’habitation, dans le secteur libre ou réglementé, de bureau ou commercial).
Le propriétaire bailleur est une personne physique ou morale propriétaire d’un bien immobilier qui le met en location et devient ensuite engagé, contractuellement, avec un locataire (ou preneur) en contrepartie notamment du paiement d’un loyer et de charges. La signature d’un bail par un propriétaire bailleur et un locataire est un document essentiel qui permet de définir les droits et les obligations de chacun. Et selon le type de bail conclu, les conditions de la location diffèrent sur certains points.
I. Les droits des propriétaires bailleurs de logements
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Bail d’habitation dans le secteur libre
Les appartements concernés sont principalement les appartements à usage d’habitation situés dans des immeubles construits après le 1er septembre 1947. Ils peuvent être loués librement quelle que soit la nationalité du locataire. La durée du bail et le montant du loyer et ses règles de révisions (généralement une fois par an, le premier jour d’une nouvelle période du bail) sont fixés selon la seule volonté du bailleur.
Le paiement du loyer et des charges et l’usage conforme des lieux
Le Code Civil monégasque énonce les obligations principales du preneur dans le secteur libre (nationalité du locataire indifférente, durée du bail et montant du loyer fixé par le bailleur). Celui-ci doit faire un usage approprié du bien loué en conformité avec sa destination définie par le bail et payer régulièrement le loyer et les charges aux termes convenus (article 1568), ce qui constitue le premier droit du propriétaire bailleur.
En cas de non-respect de cette obligation, le propriétaire peut légitimement demander la résiliation du bail auprès des tribunaux de Monaco et l’expulsion du locataire à n’importe quel moment de l’année, la trêve hivernale n’étant pas applicable à Monaco. Il en est de même si le preneur emploie la chose louée à un autre usage que celui auquel elle a été destinée, ou dont il puisse résulter un dommage pour le bailleur (article 1569) et si le locataire ne garnit pas la maison de meubles suffisants, à moins qu'il ne donne des sûretés capables de répondre du loyer (article 1592).
Quelle qu’en soit la raison, le propriétaire bailleur ne doit en aucun cas entreprendre la démarche d’expulser lui-même. Il faut d’abord initier une procédure judiciaire afin d’assigner le locataire en référé pour ordonner le paiement du loyer (le cas échéant) et l’expulsion du locataire, demande rédigée par un avocat monégasque. Le Juge rend une ordonnance, prononce la résiliation du bail et l’expulsion du locataire. Un jugement revêtu de la formule exécutoire est obtenu ensuite par l’avocat qui est ensuite signifié par un huissier au locataire défaillant avec sommation de quitter les lieux. Le locataire dispose d’un délai d’appel de 15 jours puis a un mois pour quitter les lieux. Il peut également y avoir une assignation au fond afin de récupérer les impayés et de procéder à la saisie des biens du débiteur.
Le droit de demander un dépôt de garantie
Même si ce n’est pas une obligation légale, le propriétaire-bailleur peut se prémunir des défauts de paiement et des dégradations occasionnées aux biens immobiliers en exigeant du locataire de lui verser un dépôt de garantie qui est librement déterminé. Habituellement, il correspond à trois mois de loyer et de charges, réactualisé en cas d’indexation, généralement tous les ans. Il est bien entendu entre les parties que ce dépôt de garantie n’est en aucun cas considéré comme un paiement anticipé du loyer.
Le dépôt de garantie sera restitué au preneur lors de son départ, habituellement dans un délai de 2 mois à compter du dernier jour de la location, déduction faite de toutes les sommes dues par le preneur, notamment au titre de la remise en état des biens immobiliers à la sortie des lieux.
Le droit de visite
Ce droit peut s'exercer pendant toute la durée du contrat, le plus souvent à l'occasion de la mise en vente du logement ou lorsque le propriétaire recherche un nouveau locataire en cas de résiliation du bail par le locataire occupant les lieux. Mais le propriétaire peut aussi se réserver la possibilité de visiter les lieux dès lors qu’il a prévenu le locataire à l’avance.
Il appartient au propriétaire et au locataire de s'entendre pour fixer à l'amiable ces heures de visite. Dans le cas où le locataire s’opposerait aux visites ou les rendraient difficiles, le bail peut prévoir qu’il serait alors redevable d'une indemnité compensatoire librement fixée, calculée au prorata temporis par jour ou période de visites manquées.
Le droit de récupérer l’usage du bien à l’échéance du bail (résiliation du bail)
Le propriétaire peut donner congé au locataire, sans avoir à donner de motif, conformément aux conditions du bail, le plus souvent en respectant un préavis de trois mois avant son échéance. Cette règle ne s’applique pas aux baux soumis aux lois n°1.235 et 887.
Le droit à l’entretien de ses biens.
Le bail stipule toujours que le preneur doit entretenir les lieux loués et en maintenir les installations en parfait état et qu’en fin de bail il devra les rendre parfaitement propres, entretenus et réparés et devra procéder à tout remplacement si nécessaire, à ses frais, qu’il devra justifier auprès du bailleur, le plus souvent par la présentation de la facture d’une entreprise spécialisée.
Si des équipements électroménagers sont mis à la disposition du Preneur, toute réparation ou remplacement par un modèle de gamme équivalente serait alors à sa charge exclusive, sauf en cas de vétusté manifeste.
Le bailleur est déchargé des nombreuses petites réparations qui surviennent chaque jour et qui incombent au locataire, telles que réparation de serrures, robinets d’eau et de gaz, réparation et entretien de tous appareillages, éclairages, interrupteurs, sièges, cuvettes, crémone de fenêtre, réfection de peinture de la cuisine ou des salle de bains, débouchage et nettoyage des éviers et cabinets, vidanges, entretien des carrelages, qui devront être exécutés par le locataire à ses frais et sans délai.
En revanche, le locataire ne prend pas en charge les réparations réputées locatives quand elles ne sont occasionnées que par vétusté ou force majeure (article 1594 du Code civil).
En fin de bail, et si le contrat le prévoit, le bailleur est en droit de demander au locataire de remettre en état le bien loué tel que celui-ci a été décrit dans l’état des lieux d’entrée. En effet, l’article 1570 du Code civil monégasque prévoit que s'il a été fait un état des lieux entre le bailleur et le preneur, celui-ci doit rendre la chose telle qu'il l'a reçue, suivant cet état, excepté ce qui a péri ou a été dégradé par vétusté ou force majeure.
Ainsi, par exemple, si le Preneur a reçu un bien entièrement repeint à neuf ou en parfait état et/ou comportant des sols traités, il devra, à la fin du bail, les rendre tels qu’ils lui ont été confiés, à ses frais exclusifs, et ce, quel que soit le temps de location écoulé.
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Le secteur protégé
Le bailleur doit respecter certaines obligations, afin de garantir la validité de son bail, lorsqu’il est propriétaire de biens immobiliers faisant partie du secteur protégé, lequel concerne la plupart des appartements situés dans des immeubles « anciens » construits avant le 1er septembre 1947 et soumis depuis l’après-guerre à une réglementation destinée à protéger les droits des locataires qui ont la qualité de personnes protégées. Ce secteur est régi par deux lois qui coexistent, la loi n°1.235 et la loi n°887
La loi n°1.235 du 28 décembre 2000 encadre la fixation des loyers, les conditions de location et les droits des locataires.
Ces biens ne peuvent être loués qu’à des personnes inscrites en qualité de personnes protégées auprès de la Direction de l’Habitat selon les dispositions des articles 3 et 4 de la loi n°1.235, laquelle a une vocation sociale destiné à permettre, aux Monégasques comme aux enfants du pays, de trouver un logement en Principauté.
Le propriétaire aura l'obligation de consentir au locataire un bail d’une durée de six ans, reconductible pour des périodes de six ans, résiliable annuellement selon la seule volonté de ce dernier. Cependant, le propriétaire peut le résilier moyennant un préavis d’au moins six mois avant l’échéance s’il entend faire jouer son droit de reprise :
- soit pour l’occuper lui-même ou le faire occuper par ses ascendants ou descendants ou leur conjoint, par ses frères ou sœurs ou leurs descendants, ou par les ascendants ou descendants de son conjoint, dans les conditions prévues par la loi ;
- soit s’il entend démolir pour reconstruire, ou surélever, ou modifier pour créer de nouvelles surfaces habitables, ou réparer et améliorer l’immeuble, lorsque dans ces trois derniers cas la totalité des locaux que le locataire occupe est rendue inutilisable par l’exécution des travaux.
Le relogement du locataire doit alors être assuré, pour la période du bail restant à courir, dans un local en bon état d’habitabilité situé à Monaco, sans que le montant du loyer puisse excéder celui résultant du bail en cours.
En cas de vacance du logement, une déclaration doit être effectuée par le propriétaire à la Direction de l’Habitat dans le mois suivant la libération du logement (si aucune déclaration n’a été faite dans les 3 mois, une amende de 50.000€ pourraient s’appliquer). Sauf motif légitime (travaux, remise à la location, exercice du droit de reprise), le logement doit être effectivement occupé avant l’expiration d’un délai de trois mois à compter de la date de déclaration, sauf nécessité particulière de remise en état ou aux normes. Dans le même temps, ou lorsque le logement est à nouveau occupé, une déclaration de location ou d’occupation à titre gratuit doit être effectuée.
Le montant loyer n’est pas librement défini, il est fixé en accord avec le service de l’Habitat sous l’autorité du Gouvernement et selon une grille de références.
La loi n°887 du 25 juin 1970
La loi n°887 est le premier texte de libéralisation du secteur ancien d’habitation. Elle vise les locaux de meilleure qualité ou les locaux ayant toujours été occupés par leurs propriétaires.
Les appartements qui relèvent de ce secteur sont destinés à être loués, en sus des personnes du secteur protégé, en faveur des ascendants ou descendants, ou leur conjoint, du propriétaire ou de son conjoint, de personnes domiciliées à Monaco depuis au moins cinq ans et y travaillant depuis plus de six mois ou à des personnes travaillant à Monaco depuis au moins cinq ans.
Le propriétaire aura l'obligation de consentir au locataire un bail de six ans, reconductible pour des périodes de 6 ans, résiliable annuellement selon la seule volonté de ce dernier. Le propriétaire ne peut y mettre fin qu’à l’échéance et sans avoir à en justifier le motif, contrairement au régime de la loi n°1.235. Celui-ci pourra soit remettre les biens sur le marché, soit les habiter, soit les laisser vides, ce qui, pour ce dernier cas, diffère du régime de la loi n°1235.
En cas de vacance du logement, une déclaration doit être effectuée par le propriétaire dans les 8 jours suivant la libération du logement. Dans le même temps ou lorsque le logement est à nouveau occupé, une déclaration de location ou d’occupation à titre gratuit doit être effectuée.
Le montant du loyer est librement défini par le bailleur.
II. Les obligations des propriétaires bailleurs de logements
Le bail doit également décrire les obligations auxquelles est soumis le bailleur à l’égard du locataire dont de nombreuses sont édictées par le Code civil monégasque.
L’obligation de louer conformément à la destination des biens
Le bailleur doit respecter l’usage des locaux loués, déterminé dans le règlement de copropriété. Ainsi, le bail d’habitation ne lui permet pas de les louer à usage de bureau, sauf si le bail est à usage mixte. Dans ce cas, toute activité commerciale est interdite ainsi que l’exercice de toute profession, même libérale.
L’obligation d’assurer le clos et le couvert des biens
Le clos et le couvert constituent l’ensemble d’éléments (produits de construction) qui assurent l’étanchéité d’un bâtiment et empêchent l’eau et à l’air de passer. On peut également parler de mise hors d’eau / hors d’air.
Non limitativement, cela consiste dans le fait que:
- le gros œuvre du bâtiment et de ses accès soient en bon état d’entretien et de solidité contre l’eau ;
- les menuiseries extérieures et la couverture avec ses raccords et accessoires assurent une protection contre les infiltrations d’eau ;
- les dispositifs de retenue des personnes (garde-corps) dans le logement et ses accès (fenêtres, balcons, escaliers…) doivent être dans un état conforme à leur usage.
L’obligation d’entretenir les biens
La première d’entre elle résulte de l’article 1559 qui stipule que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière :
- de délivrer au preneur la chose louée ;
- d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ;
- d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail.
En découle l’article 1560 qui indique que le bailleur est tenu de délivrer la chose en bon état de réparations de toute espèce. Il doit y faire, pendant la durée du bail, toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que les locatives. C’est le cas notamment des grosses réparations décrites dans l’article 491 du Code Civil qui sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières ; celui des digues et des murs de soutènement et de clôture, aussi en entier, si ces digues et murs sont en maçonnerie. Toutes les autres réparations et même les reconstructions des digues, murs de clôture et de soutènement à sec, ne sont que d'entretien.
Enfin, le bailleur ne peut, pendant la durée du bail, changer la forme de la chose louée (article 1563).
La souscription d’une assurance propriétaire non-occupant (« PNO »)
Le propriétaire d’un logement, même lorsqu’il ne l’occupe pas, doit aussi protéger contre certains risques : son bien immobilier, ses voisins et soi-même en cas de sinistre : la loi n°1.531 du 29 juillet 2022 l’oblige à souscrire une assurance propriétaire non-occupant auprès d’une compagnie d’assurance agréée dans la Principauté de Monaco.
Elle permet de couvrir les risques qui ne seraient pas couverts par l’assurance habitation du locataire (qui est obligatoire en toute circonstance). Elle permet aussi de se prémunir des éventuelles dégradations causées directement par le locataire,
Une compréhension approfondie des droits et obligations des propriétaires bailleurs ainsi que ceux des locataires à Monaco est indispensable pour assurer une gestion immobilière efficace.
Barnes - Valeri Agency connait parfaitement les nuances juridiques entourant l’habitation dans le secteur libre et protégé et se fera fort d’être le mandataire de propriétaires bailleurs pour les représenter lors de toutes les étapes, de la commercialisation à la gestion.